Alors que les marchés développés marquent le pas, les émergents séduisent. Mais ils ne sont pas sans danger. Quelques pistes à suivre...
Difficile d’évoquer la plupart des problématiques liées à l’investissement de nos jours sans évoquer les marchés émergents. Ils sont partout ! Alors que l’Europe et les Etats-Unis sortent péniblement, dans le meilleur des cas, de la récession, des pays tels que le Brésil ou la Chine affichent des taux de croissance insolents. Les marchés émergents ont été les principaux contributeurs à la croissance mondiale au cours des dernières années, et beaucoup s’attendent à une amplification de cette tendance. Dans un contexte d’abondance de liquidités en provenance de nos Banques Centrales, les places boursières émergentes sont en plein boom et affichent des performances à deux voire trois chiffres. Dans un tel environnement, il est naturel que les investisseurs s’intéressent à ces marchés. La place qu’il convient de leur allouer au sein d’un portefeuille diversifié dépend de la situation patrimoniale et des objectifs de chacun, mais tous les investisseurs peuvent respecter certains principes de base.
Avant tout, les investisseurs doivent s’assurer de ne pas dupliquer une exposition déjà existante acquise entre autres à travers des fonds d’actions internationales. Certains fonds investis en Europe ont parfois des univers d’investissement élargis et peuvent être exposés de manière significative à la Russie et à la Turquie. Enfin, certains fonds sectoriels, notamment ceux liés à l’énergie et aux matières premières, sont eux aussi considérablement exposés aux marchés émergents. Une partie de votre portefeuille est donc peut-être déjà engagée sur ces marchés sans que vous déteniez pour autant un fonds qui y soit entièrement dédié.
Ceux qui souhaitent accroître leur exposition doivent s’assurer d’avoir bien compris la nature des risques inhérents à ce type d’investissement. Les marchés émergents sont volatils et subissent des à coups violents que tout investisseur n’est pas prêt à supporter. Il n’est donc pas judicieux d’empiler les risques et il est préférable de favoriser des stratégies diversifiées sur plusieurs régions plutôt que de s’emballer pour des fonds très en vogue mais qui n’investissent que sur un seul pays. Rappelons que les marchés émergents présentent des risques politiques et qu’ils n’offrent pas nécessairement le même degré de protection et de respect des intérêts des investisseurs que les places boursières des pays développés.
La popularité des marchés émergents depuis plusieurs années ne garantit pas que leurs places boursières continueront à surperformer celles des marchés développées. Chaque chose a un prix et certains investisseurs utilisent même les performances des marchés émergents et les flux colossaux de l’épargne mondiale qui s’y déversent comme des indicateurs contrariants pour justifier une certaine prudence à leur égard. Les arguments en leur faveur ne manquent pourtant pas et l’on compte dans cette classe d’actifs des gérants parmi les plus talentueux du marché. Nous vous présentons ici quatre fonds qui font partie de nos plus fortes convictions dans cette catégorie.
Baring Global Emerging Markets Fund
Ce fonds est géré par James Syme depuis décembre 2006. Il a bâti un solide historique de performance en utilisant le processus d’investissement qui a bien réussi au fonds depuis sa mise en place. Les performances de court et de long termes sont bonnes : à fin octobre 2010, le fonds a surperformé la moyenne de sa catégorie de 3,2% en rythme annualisé sur trois ans et de 4,2% sur cinq ans. La réussite de ce fonds est attribuable à la qualité de son approche d’investissement qui commence par une évaluation approfondie des pays en fonction de cinq facteurs : croissance, liquidité, devise, gestion et valorisation. La sélection de titres est tout aussi importante et les sociétés sont d’abord filtrées sur leur liquidité. Puis elles sont analysées à l’aune des mêmes facteurs que pour les pays, l’objectif étant de trouver les meilleures sociétés dans les meilleurs pays. Le succès de la stratégie atteste de l’efficacité de ce process mais il est important d’avoir les bons professionnels aux commandes.
C’est là qu’intervient Syme. L’équipe a connu une certaine instabilité par le passé et nous pensons qu’avec Syme en place depuis 2006, les choses se sont stabilisées. Il travaille en étroite collaboration avec deux co-gérants expérimentés. Ce trio fait à notre avis un bon travail, et est épaulé par une solide équipe de 20 analystes basés dans les plus gros marchés émergents. La taille de l’équipe témoigne de l’engagement de Baring sur cette classe d’actifs. Ce fonds est noté Supérieur.
First State Global Emerging Markets Leaders
Ce fonds est à notre avis une option de premier choix pour s’exposer aux marchés émergents. Depuis début 2009, il n’est plus géré directement par le très expérimenté et renommé Angus Tulloch mais ce dernier reste chez First State Investments. Il a passé les rennes à Jonathan Asante et David Gait, deux gérants très expérimentés sur cette classe d’actifs. Ils bénéficient du soutien d’une des équipes les plus étoffées que nous connaissions. Forte d’une vingtaine d’analystes, elle aborde l’univers des émergents de manière prudente. L’approche se concentre sur des sociétés disposant de fortes barrières à l’entrée, avec un bon management, et dont les moteurs de croissance sont jugés pérennes. Les valorisations doivent rester raisonnables, et compte tenu de l’importance accordée à la préservation du capital des investisseurs, l’équipe ne transige pas sur les standards de corporate governance.
Ce type d’approche ciblée n’accorde que peu d’intérêt aux indices et le portefeuille se distingue largement de ses pairs tant en termes de positionnement sectoriel que géographique. L’attention portée au niveau de valorisation a par exemple conduit l’équipe à largement sous-pondérer la Chine par rapport à la catégorie Morningstar Actions Emergentes au cours des cinq dernières années. De même, la préférence pour des sociétés avec des bénéfices réguliers se traduit par une faible exposition aux secteurs de l’énergie et des matériaux industriels. Cette indépendance d’esprit implique nécessairement des périodes de sous-performance à court-terme : la prudence à l’égard de la Chine a coûté en performance relative en 2007 tout comme l’absence de valeurs très cycliques en 2009. Les investisseurs ne doivent pas s’en inquiéter au regard des résultats de long terme. Sur cinq ans à fin octobre 2010 par exemple, le fonds surperforme la moyenne de ses concurrents de 5,5% par an et se classe dans le premier décile de sa catégorie. En plus, il est bien moins cher que d’autres. Nous pensons que les investisseurs sont entre de bonnes mains avec ce fonds que nous notons Elite.
Magellan
Ce fonds lancé en 1988 n’a plus à faire ses preuves. Il incarne l’approche de Comgest résolument orientée vers les sociétés de croissance et de qualité. L'équipe ne s'intéresse qu'aux entreprises à la rentabilité élevée et capables d'accroître leurs bénéfices indépendamment du cycle économique. Elles disposent généralement d'une position commerciale dominante, d'un management solide et d'un bilan sain, exempt de dettes. Les valeurs appartenant aux secteurs les plus cycliques ainsi que celles du secteur financier sont donc généralement exclues de l'univers d'investissement. Il en résulte un portefeuille concentré (environ 40 titres), de conviction, et qui ressemble évidemment très peu aux indices, tant au niveau sectoriel que régional. Ces titres sont généralement issus des secteurs de la consommation, et l’équipe a également trouvé de nombreuses opportunités au sein des télécoms dans les marchés émergents. Par ailleurs, l'attention portée à leur solidité financière et au niveau de valorisation procure au portefeuille un caractère défensif qui a montré toute sa pertinence lors de la chute de 2008, le fonds ayant abandonné 8,6% de moins que la moyenne de la catégorie.
Les gérants ont un horizon d'investissement long et n'hésitent pas à aller contre la tendance du marché. Les gérants sont par exemple volontairement restés à l’écart des valeurs cycliques en dépit de leur rebond spectaculaire en 2009. Ceci a logiquement nui à la performance relative cette année-la, mais comme toujours, les mérites de cette offre doivent s’appréhender sur le long terme. Sur des périodes de trois, cinq et dix ans à fin octobre 2010, le fonds se classe dans le premier quartile de la catégorie avec une volatilité moindre.
Le fonds est géré depuis 1994 par Vincent Strauss qui, avec 30 ans d'expérience, est l'un des gérants les plus expérimentés sur cette classe d'actifs. En 1999, il est rejoint par Wojciech Stanislawski, nommé co-gérant. Ce tandem talentueux travaille de façon réellement collégiale avec le reste de l'équipe. Celle-ci est composée de 11 membres expérimentés, et se répartit entre les deux bureaux du groupe à Paris et Hong Kong. L’équipe compte également sur la recherche de Sunman Investment Advisors en Inde, une société de conseil qui ne travaille qu’avec Comgest. Ces ressources substantielles attestent de l’engagement de la société de gestion envers les marchés émergents. Ce fonds est l’un de nos préférés et nous le notons Elite.
Robeco Emerging Stars Equities
Ce fonds est indéniablement plus risqué que d’autres mais il bénéficie de l’expérience de ses gérants. Robeco a lancé son premier fonds dédié aux marchés émergents en 1994. L’équipe compte toujours certains de ses vétérans, à commencer par Wim Hain Pals. Il est le responsable de l’équipe basée à Rotterdam, composée de sept gérants de portefeuille et deux analystes. Plus spécifiquement, c’est Jaap van der Hart qui gère Robeco Emerging Star Equities, un autre membre chevronné de l’équipe qui a rejoint Robeco en 1994.
Cette offre se distingue de la plupart de ses concurrents par son portefeuille concentré. Le fonds n’est pas géré par rapport à un benchmark et seuls les pays et les sociétés figurant parmi les plus fortes convictions de l’équipe sont intégrés dans le portefeuille. Au niveau géographique par exemple, 80% des actifs du portefeuille sont concentrés dans seulement cinq pays : la Corée, la Chine, la Turquie, le Brésil et l’Inde. Une fois ces pays sélectionnés, l’équipe identifie les tendances porteuses de croissance. Par exemples l’essor du secteur financier en Turquie ou le développement de la classe moyenne au Brésil. La sélection de titres qui en résulte conduit à un portefeuille resserré autour d’une cinquantaine de position, avec une forte concentration donc au niveau des cinq premiers pays. Nous aimons les gérants qui font preuve de convictions.
Les investisseurs doivent cependant bien garder à l’esprit les risques que cela implique. L’histoire récente l’illustre bien. En 2008, le fonds a perdu plus de la moitié de sa valeur, et 3% de plus que la moyenne de la catégorie. A l’inverse, à la reprise de 2009, le fonds a obtenu des résultats exceptionnels. Les gérants ont notamment profité d’une bonne sélection de titres en Chine sur des sociétés orientées vers la croissance domestique. L’exposition plus importante que la catégorie aux sociétés de petite capitalisation s’est également révélée bénéfique. Compte tenu de la volatilité du produit, il est recommandé de le détenir dans une optique de long terme. L’équipe de gestion Marchés Emergents de Robeco dispose d’un bon historique de performance dans cet univers, et ce fonds se classe à fin octobre 2010 dans le premier quartile de la catégorie. L’équipe est d’après nous à même de gérer cette proposition risquée, et le fonds est noté Supérieur.
(Thomas Lancereau - Morningstar - 14/02/11)
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